mardi 12 mars 2024

                           Le Sceptre et la Plume 


Pendant quelques semaines un ami  m'a accompagné, un peu chaque jour. Cet ami est un livre magnifique "Le Sceptre et la Plume" de Bruno de Cessole, édité chez Perrin.

Bruno de Cessole est, journaliste, historien, critique littéraire et écrivain; une pointure en quelque sorte. 

Lauréat du prix Richelieu, puis du prix des Deux Magots, il est auréolé du prix Henri-Gral de l'Académie française pour l'ensemble de son oeuvre.

Le Sceptre et la Plume, ce sont 24 personnages historiques, tous hommes  politiques et de lettres ou amoureux de la littérature, écrivains ou poètes que Bruno de Cessole dessine d'une écriture somptueuse.

De Montaigne à Mitterrand en passant par  Napoléon, Chateaubriand, Victor Hugo, Clémenceau, Blum, et de Gaulle bien sûr.

Voilà comment, à propos de Montaigne, cet ouvrage commence:

"Faut-il croire à la sincérité d'un écrivain qui, d'emblée, dans son adresse au lecteur, jure qu'il n'a eu en écrivant, d'autre dessein que personnel et désintéressé. 

Tout  est du même tonneau. Chateau Ausone 1949, je vous l'assure. C'est du très grand.

Que de talent pour la synthèse il faut, pour faire tant dans si peu d'espace.

20 à 25 pages par sujet, et quels sujets !

Pascal avait écrit dans une de ses lettres  "Je n'ai fait cette lettre plus longue que parce que je n'ai pas eu le loisir de la faire plus courte".

Il est difficile de ne pas être bavard. 

Dans cet exercice, notamment, Bruno de Cessole atteint des sommets.

Il agrémente ses écrits de citations merveilleusement choisies, parfois longues, qui permettent au lecteur de mieux cerner l'oeuvre mais aussi , surtout peut-être, l'homme qui a la plume dans une main et  parfois l'épée dans l'autre, les accordant, l'une et l'autre.

Tenez :

Saint-Simon à propos de Louis XIV :

"Les louanges, disons mieux, la flatterie lui plaisait à tel point que les plus basses étaient les mieux savourées".


Napoléon, encore Bonaparte,  à son frère Lucien:

"J'ai lu ta proclamation; elle ne vaut rien. Il y a trop de mots et pas assez d'idées. Tu cours après le pathos, ce n'est pas ainsi qu'on parle aux peuples. Ils ont plus de tact et de sens que tu ne crois".


Hugo: 

"Je vous dénonce la misère, cette longue agonie du pauvre qui se termine par la mort du riche".


Clémenceau:

"En politique on succède à des imbéciles et on est remplacé par des incapables".


De Gaulle - que Bruno de Cessole nomme "Le dernier romancier de la France" -  à propos des français et de leur engagement pendant la guerre:

"Ceux qui avaient à choisir entre les biens matériels et l'âme de la France, les biens matériels ont choisi à leur place. Les possédants sont possédés parce qu'ils possèdent" .

Je cite cette dernière phrase dans un livre dont je vous entretiendrai sans doute un jour.

Sur Mitterrand il écrit:

"Tout au long de sa vie politique François Mitterrand aura eu des sincérités successives. Mais il est, au moins, une fidélité qu'il n'a jamais trahie, reniée ou mise en veilleuse: son amour de la littérature et son goût des écrivains".

Mitterrand clôture donc le prestigieux défilé.

 

Partageant sur ce livre avec l'ami très cher qui m'a engagé à faire ce blog, celui-ci eu cette phrase:

" Bruno de Cessole a réussi la prouesse de réconcilier l'inconciliable: la littérature et la politique".

Tout est dit.

Bruno de Cessole écrit dans son Introduction:

"Même si la figure de l'homme d'État-écrivain, que Charles de Gaulle et François Mitterrand furent sans doute les derniers à incarner, ne paraît pas reproductible, reste l'incitation à élever la politique à une altitude supérieure à la gestion des affaires courantes et à la satisfaction des intérêts catégoriels"


C'eût pu être tout autant la conclusion et l'espoir, que je n'espère pas vain, formulés dans ce très beau et très grand livre.








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