lundi 22 avril 2024

                                

                                J'admire Jean-Luc Mélenchon



Dussé-je vous surprendre, j'admire Jean-Luc Mélenchon. 

Je vais ici tenter de vous dire les causes de mon admiration.

Elles sont triples.

La première est son courage.

En 1986, à 35 ans, âge auquel d'ordinaire les chevaux légers insouciants ou irresponsables se présentent aux législatives , Jean-Luc Mélenchon bravant l'adversité  a choisi de se présenter  à l'élection sénatoriale dans le département de l'Essone. 

Il s'agit, ici, d'un scrutin de liste. Sa position - à l'abri derrière la tête de liste-  l'assure d'une élection qu'un chameau aurait aisément emportée. 

Eh bien oui, Monsieur Mélenchon a eu le courage de se présenter à la place du chameau et a été élu. Il restera au sénat jusqu'à ce qu'il manifeste l'envie de mener un autre combat. Chapeau!

En 2009, il est candidat aux élections européennes, scrutin de liste encore par grande région.  Il choisit le grand ouest. L'homme est un grand voyageur, on le verra plus loin.  Sa position sur la liste du parti socialiste le prémunit d'un échec. Il est élu. 

Chapeau, de nouveau!

Il entame alors un combat d'une toute autre ampleur et se fait désigner candidat du front de Gauche pour l'élection présidentielle. L'ancien trotskiste "lambertiste" de l'OCI (acronyme de Organisation Communiste Internationaliste) a appris à manoeuvrer.  

Au premier tour, résultat 11,10% .

Ce score honorable l'encourage à persévérer et après avoir créé en 2016 un mouvement à sa dévotion, La France Insoumise, il se présente de nouveau en 2017. D'autres auraient jeté l'éponge, lui est courageux. Quoi qu'il lui en coûte, il y retourne donc et progresse. Toujours 4ème mais avec 19,58%.

C'est alors, qu'après ce qu'il considère comme une victoire, Monsieur Mélenchon décide du combat le plus difficile de sa carrière politique: se présenter à l'élection législative. Scrutin uninominal à deux tours. 

Mélenchon, seul contre l'adversité.

Il choisit la 4ème circonscription des Bouches du Rhône . Quand je vous dis qu'il aime les voyages.

Cet homme a 66 ans pourtant, il pourrait prendre sa retraite. D'ailleurs il la veut pour tout autre que lui, dès 60 ans. Mais voilà, on a l'esprit de sacrifice ou on ne l'a pas. Lui l'a.

Territoire difficile quand on est un homme de gauche que cette 4ème circonscription des Bouches du Rhône. Pensez donc ! De 1962 à 1993 la gauche l'a toujours emporté au 1er tour. Après ce ne fut qu'au second, certes, mais avec des scores élevés ou très élevés: 

1993: 54,72 %

1997: 58,36 %

2002: 64,80 %

2007: 57,41 %

2012: 70,51 %

Sinon un chameau,  une chèvre peut-être...

Mais non,  qu'allez donc-t-il faire dans cette galère ? Ce n'est plus du courage, c'est de la témérité. Eh bien croyez-moi, il a pris la place de la chèvre, et a été élu, au second tour avec 59,85% des voix. 

Que voulez-vous, moi j'admire. Il en faut de l'abnégation pour voyager ainsi en dehors de ses terres et rechercher des combats qu'on ne peut pas perdre.

En 2022, candidat aux présidentielles de nouveau, il monte à la troisième place avec un score de 21,95%.

Le vecteur de cette foudroyante progression ? Un don de tribun  certain au service d'un argumentaire compliqué qu'on peut résumer d'une phrase "tous des salauds qui vous exploitent". 

Il en faut là encore du courage. 

On imagine que pourtant fatigué des luttes, il  tentera de se sacrifier une fois encore en 2027. 

Sur le courage, j'arrêterai là. 

Vous me traiteriez  de dévot.


J'en viens donc à sa deuxième qualité, la modestie.

Rappelez-vous le 16 octobre 2018 devant le policiers perquisitionnant le siège de son parti - sur ordre d'un juge il est important de le préciser -  , à la suite de soupçons de fraude sur les comptes de sa campagne présidentielle de 2017. 

Que notre homme a-t-il opposé à ceux qui faisaient sottement leur devoir ? 

 "La République c'est moi"

Les forces de l'ordre et le juge l'avaient obligé, malgré lui, à rappeler au monde que la République française c'est Jean-Luc Mélenchon.

À un autre moment, il avait dit aux même policiers: "Ma personne est sacrée".

Il est vrai que dans son enfance il avait  servi la messe. Il a en revanche quelque peu confondu: Dieu est Dieu.  Mélenchon n'est pas Dieu. Tout le monde peut se tromper; on lui pardonnera

Regardez et écoutez, sur youtube par exemple, la déclaration qu'il a faite le soir du second tour des législatives de 2022, au cours desquelles son parti a connu, il est vrai,  un réel succès. 

C'est de Gaulle. La geste c'est de Gaulle, le vocabulaire c'est de Gaulle. Il a enfin trouvé son ton.

Je l'imagine répétant dans sa chambre, en pyjama,  devant une armoire à glace.

N'empêche ! Il a condescendu. Jusqu'à de Gaulle. 

J'admire.


Enfin, la troisième et la plus admirable de toutes,  est son amour des grands leaders épris de démocratie .

Castro d'abord:

Des milliers de prisonniers politiques, des centaines d'exécutions sommaires d'opposants dont le tort, démocratiquement insupportable,  était qu'ils n'étaient pas d'accord.

Et bien oui, Jean-Luc Mélenchon, l'aime ce Castro.

" Cuba n'est pas une dictature, pour moi clairement non"

Puis après le décès du Leader Maximo: 

"Voici la cohorte des opprimés qui t'escorte dans ta dernière marche"

Mais la cohorte ne peut pas suivre, Jean-Luc. 

Les opprimés sont en prison ou font la queue pendant des heures en attendant un bus qui peut-être, sans doute même,  ne viendra pas. 

Il faut y avoir été, à Cuba du temps du Leader Maximo. J'y suis allé. 

Quel beau peuple pourtant que ce peuple cubain. 

Il faut avoir entendu, là-bas,  "Buena vista social club".

Il faut avoir lu Leonardo Padura, écrivain cubain,  au  livre magnifique "Poussière dans le vent".  On imagine que Jean-Luc Mélenchon ne l'a pas lu, ou ne l'a pas aimé. 

Mais ne chipotons pas, ce que déclame Jean-Luc Mélenchon, c'est beau comme l'antique. N'est-ce pas ?


Chavez et Maduro ensuite:

Ah la révolution bolivivarienne que notre Jean-Luc adule !

Ah son opposition muselée, interdite, emprisonnée !

Ah,  ses cohortes de pauvres dans un pays qui marche pourtant sous des réserves consedérables d'or noir !

Ah ses affamés, exilés par millions !

Il faut l'avoir vu, le Vénézuela, au fond de lui même. Je l'ai vu il y a près de vingt ans. C'était presque l'enfer. Maintenant ça l'est,  tout à fait. 

Les manifestations d'opposants sont tirées à balles réelles.

La police violente et torture.

Mais Monsieur Mélenchon sait, lui, ce qui est essentiel.  Et il a le courage de le dire:

"Il faut que Maduro tienne"

"Nous ne perdons pas notre temps à jeter des pierres à nos amis".

Nos amis..., mon Dieu!

Lisez "La Fille de l'espagnole" de Karina Sainz Borgo, une autobiographie romancée - je n'emploie pas à dessein le terme d'autofiction-  terrifiante, qui vous prend à la gorge, écrite d'une superbe plume nourrie portant dans un encrier de sang.

Elle est partie en Espagne en 2006,  à 24 ans, pour pouvoir écrire. Simplement avoir le droit d'écrire.

Si par malheur il advenait que Maduro vienne à mourir  -ce ne sera pas de faim, il est replet et laisse la faim à son peuple - Jean-Luc Mélenchon, empli d'une insondable tristesse pourra redire:

 "Voici la cohorte des opprimés qui t'escorte dans ta dernière marche".


Jean-Luc Mélenchon est  homme admirable, décidément.







3 commentaires:

  1. De bon matin, ta plume me fait sourire malgré tant d’amertume et de désespoir à te lire. Il nous faut bien affronter tant de vérité crasse.
    Maï H-H

    RépondreSupprimer
  2. Mélenchon, ce populiste insupportable qui a détruit lui même la Nupes qu'il avait réussi à créer.

    RépondreSupprimer