lundi 20 janvier 2025


Le Renard, le Guide et l'Âne. 

Libre adaptation du Renard et le Bouc 

Fable de Monsieur Jean de La Fontaine

 

 

L’un était avocat, nerveux et fort petit,

Déterminé à vaincre et puis à présider.

L’autre était grand et rouge, son principal souci

Était de fort bien vivre sans beaucoup travailler.

Les deux étaient bourgeois, et s’étaient connus tôt,

L’un avait de l’argent, l’autre avait du culot.

 

« Mets-toi à mon service dit le Petit au Grand,

Je suis jeune c'est vrai, mais il est déjà temps,

Et tu seras, crois-moi, grandement récompensé. »

Le temps fit à l’affaire. Année après année,

Le Petit prospéra dans la sphère publique

Et le Grand le suivant, entra en politique.

Tous deux, l’un trainant l’autre, furent nommés aux affaires.

Le Petit dans un grand ministère,

Le Grand dans un petit, car en cette matière, 

La taille ne fait pas la carrière.

 

Le vieux Président faiblissant, 

Le Petit sentit bien que son heure arrivait. 

En politique dit-il, l'important est de tuer.

Il ne faut jamais perdre ne fut-ce qu'un instant.

Chaque jour, y pensait, la mousse sur le menton,

Se disant ce qu’il manque "ce sont des picaillons". 

 

Il envoya le Grand dans les sables libyens.

« Va voir le Guide, dit-il trouve donc un prétexte, 

Invente le sujet peu importe lequel,

Tu as faites des études, écris nous donc un texte.

Ce qui compte c’est l’argent car j’en ai grand besoin.

Tuer la concurrence par ma puissance de feu.

La dégoûter et submerger le jeu.

Et puis à la toute fin, arriver à l’autel ! »

 

« Dis-lui que Président, car je l’emporterai,

Le recevrai en pompe jusque dans mon palais.

Se rêvant rétabli parmi les souverains

Le sinistre sanguinaire casquera, c’est certain. »

 

Tu as peur lui dit-il ?

Ne suis-je pas ton ami ? Que dis-je, je suis ton frère!

Allez, va, ne crains rien, parole d’Évangile,

Je suis un homme sincère.

Mon cœur te protègera et puis ma force aussi. »

Notre homme part en voyage, et fait comme il est dit.


Le temps vint à passer, des mois, et des années

Un juge s’en mêla et puis d’autres en nombre,

Ils trouvèrent des choses que l’on avait cachées,

Des libyens bavardèrent étant sortis de l’ombre.


Le Petit n’était plus grand-chose, 

Et le Grand encore moins, on s’en doute et pour cause.

Ils furent donc poursuivis et vinrent au tribunal, 

Avec leurs complices, les uns derrière les autres.

Ainsi qu’au carnaval.

Ils cherchaient à paraître, mais avaient la mine pauvre.

 

Interrogé d’abord, ayant été le chef,

Le Petit se fâcha, monta sur ses ergots,

Rouge de colère il prononça ces mots :

« Comment peut-on oser, vierge comme Saint-Joseph,

 N'ai jamais fait de mal, ne vais pas dans les soutes . »

Et désignant le Grand il dit aux magistrats, « Voilà qui sait sans doute.

Questionnez-le maintenant

Moi, je suis exemplaire. »

Puis, lui tournant le dos, son chauffeur l'attendant, 

Roula vers ses affaires.

 

Le Grand, triste et perdu, le regard soudain vide, 

Se dit mais c’était tard "Mais quel âne je fais!".

Avoir vécu pour lui, et être ainsi lâché!  

Qui veut un ami fiable honnête et courageux,

Pour qui nommer "son frère" n’est pas un simple jeu,

Doit l'observer cent fois, le sonder à l'envi,

Et préserver son âme d'un si méchant ami.



8 commentaires:

  1. Génial ! Fais nous la même chose sur Donald, stp !

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  2. Me voilà sans voix. Et ce n’est même pas drôle.
    Maï H-H

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  3. Si c'était qu'une fable,
    Fort bien écrite il est vrai,
    Racontant de notables
    Une bien triste vérité
    Pour tout son talent j'applaudirai l'auteur
    Mais que de vérité, c'est bien là le malheur
    FW

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  4. J'attends chaque semaine ta chronique comme les mots croisés de Télérama !! Cette fois ci, l'histoire du petit Nicolas..qui me rappelle la bd du calife Haroun el poussah et du vizir Iznogoud .. la série n'est pas close, quel plaisir! Jp

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    1. Merci JP. Mais comparé àTabary et Gosciny, je ne suis qu'un caillou au pied de la Tour Effeil. Amitié

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  5. Très belle fable.
    Une suite encore plus triste
    Va t'elle surgir ?
    PH

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